La disparition d’un Titan
Alors que vient de disparaître le chef d’orchestre Bernard Haitink et que se déroule en ce moment au Musée de l’Orangerie une exposition consacrée au peintre américain David Hockney (A year in Normandie), remontons nos souvenirs à l’automne 1980 quand ces deux artistes se retrouvèrent ensemble sur la scène du Théâtre des Champs-Élysées.
En ce début de saison 1980, le Festival d’Automne célèbre Stravinsky et de nombreuses manifestations et concerts sont organisés dans plusieurs salles parisiennes. A cette occasion le Théâtre accueille quatre représentations de la jeune mais déjà mythique production du Rake’s progress signée du metteur en scène John Cox et du peintre David Hockney créée cinq ans plus tôt au Festival de Glyndebourne. Bernard Haitink avait déjà dirigé la création en terres anglaises et il était du voyage parisien.
Un interprète au répertoire gigantesque
Chef historique de l’Orchestre du Concertgebow d’Amsterdam, dont il a conduit les destinées durant vingt-cinq ans, celui que l’on surnommait « le sphinx » pour sa discrétion et son humanité, a dirigé les plus grandes phalanges à travers le monde. Il avait fait sa première apparition avenue Montaigne en décembre 1962 à la tête de l’Orchestre National de la Radiodiffusion (le nom alors de l’actuel Orchestre National de France), un orchestre avec lequel il conservera toujours une relation privilégiée. En quarante-cinq ans de régulières venues au Théâtre au pupitre de divers orchestres français et étrangers, il aura offert aux parisiens quelques-unes des grandes pages de ses compositeurs qu’il a chéri tout au long de sa carrière, en particulier Bruckner (une mémorable 8e avec les Wiener Philharmoniker, Chostakovitch (avec les Wiener et l’ONF) et bien sûr Mahler (plusieurs fois avec l’ONF et avec les Wiener). En revanche, il fut plus rare à Paris dans le domaine de l’opéra et ne dirigea en fosse qu’à deux reprises.
En 1980 pour ce Rake’s Hockneyen (avec la toute jeune Felicity Lott en Ann Trulove) et en 2007 pour Pelléas et Mélisande dans la production signée Jean-Louis Martinoty, un ouvrage dont il avait donné quelques années plus tôt, toujours avenue Montaigne, une magistrale version de concert que l’on peut retrouver au disque (Naïve).